Il y a pas mal de portraits dans les temps qui sont miens – ces temps-ci, j’ai la furieuse conviction (mais si ferme, cependant) que ces temps-là sont comptés – depuis cet été et cet accident, AIT dit-on, la neurologue était assez pour, pas complètement, peut-être bien oui, depuis le dry qui dure sans durer – des portraits donc, tout à l’heure le nino s’est mis en mode selfie/moi-même/automatique – ça m’a déprimé vaguement – je reviens trouver ces quelques images, en portraits – un portrait magnifiquement interprété par Fernanda Torres – celui d’Eunice – un film brésilien, on y parle portugais – la dimension intersectionnelle apparaît en filigrane – on s’en fout, peut-être un peu, mais cependant le film est critiqué par l’ordure alors au pouvoir (en 1971) (ce qui lui donne sans doute une dimension supplémentaire – car s’il déplaît aux immondes c’est qu’il est doté de certaines qualités) – il y a pas mal de photos c’est le début des années soixante-dix au Brésil – de l’autre côté des Andes Salvador Allende a pris le pouvoir – une famille heureuse, Copacabana Rio de Janeiro toute la vie, toute la vie…
il y a des bruits de bottes, il y a des exécutions sommaires, on pense au bouton de nacre évidemment, il y a de la pourriture partout (ça vous a un air furieusement contemporain) – mais ces deux-là s’aiment (Eunice, et son mari Rubens – Mello Selton – et il en est de même de leurs enfants – résistance à l’oppression – et puis
le sait-on ? On le sent – la voiture rouge le sourire le soleil – adieu – tu sais ce genre d’histoire (je pense à Attila, à César, à Staline) ce genre d’histoire me blesse – laisse oublie : non – la plage 5 heures du soir
ce sourire – peu de choses mais complètement tout s’enfuit tu sais, plus personne attendre, non – rien
elle seule avec ses enfants (ils et elles l’aident) – avancer en âge – ne rien laisser aux meurtriers tu sais – ne rien publier, se battre continuer – être là -formidablement : une image , un portrait de cette famille, sans père : pourquoi
le pourquoi fait suite à « ne pas sourire » – ne pas sourire – le monde veut que nous soyons tristes, il nous veut blessés, il veut que l’horreur nous submerge
nous sourirons, nous aurons la joie de notre côté, quand même ils nous auront (ils, tu sais bien, ils) battus humiliés meurtris – nous (leur) sourirons
sourires magistraux – non,rien – rien ne leur sera laissé – nous nous battrons – nous aimerons la musique nous aimerons la danse, nous aimerons être égaux – car nous le sommes – des années de lutte
faire survivre la mémoire de Ruben, survivre malgré les tortures, les meurtres, les déchirures, malgré la loi du plus fort – continuer tu sais – jamais le fascisme ne gagnera jamais, ni là-bas ni ici – jamais
jamais…
Et que vive le cinéma
Je suis toujours là, un film (magnifique) réalisé par Walter Salles
Merci. Le sourire, leurs sourires . Précieux de te lire et de remonter le cours du film. Oui. Bouleversant.
je sais…mais oui sourire, sourire comme une arme et aimer comme une arme aussi mais pas à eux destinés, une arme par le lien par l’union
c’est magnifique
« sourires magistraux – non,rien – rien ne leur sera laissé – nous nous battrons – nous aimerons la musique nous aimerons la danse, nous aimerons être égaux – car nous le sommes » (très très envie de voir ce film maintenant)
@nathalie holt, brigitte celerier, chjeanney : merci à vous